rose, 2005
photographie couleur
40 x 60 cm
tirage à 3 exemplaires
Une chaise, une table, un radiateur en fonte, une baie nue ouverte sur un jour blafard, une méchante étagère formant demi-cloison entre l'espace figuré, et l'autre espace, dans l'ombre du hors-champs. Rose s'inscrit dans le vaste travail photographique que Barbara Noiret a consacré à l'univers de la psychiatrie entre 2004 et 2007. Cette série est principalement composée de vues architecturées, photographiées en couleurs.
Une chaise, une table, un radiateur, une baie, une méchante étagère, baignés dans une lumière crue que l'harmonie des murs roses, de la poubelle et du revêtement gris, au sol, adoucie, au point de susciter chez le spectateur cette doucereuse impression qui confine à l'étouffement et au malaise. Il faut noter que le titre, faussement neutre, souligne encore la présence obséquieuse de ce rose, et peut-être, participe à sa mesure, à l'étouffement dans la nudité.
Si le point de vue de l'artiste est frontal, faisant d'un mur rose, et d'un bureau inoccupé le thème du tableau, notre œil tente en vain d'échapper à la géométrie misérable de cet environnement clos. Les indications de perspectives, mais plus encore la distribution de la lumière, de la gauche vers le centre conduisent irrémédiablement le regard vers ce bureau d'un hideux bois verni. Ce dispositif que Vermeer orchestrait en peinture avec une efficacité voisine, hurle l'absence de la liseuse de lettre, de l'astronome, ou même, revenons à l'hôpital : celle du patient. L'incontournable absence du patient dans le tableau de sa propre chambre fait de celui-ci le véritable sujet de Rose. Cette peinture de l'absence ouvre une brèche béante dans la quiétude factice de l'environnement fonctionnel d'une banale chambre d'hôpital, atrocement calme et confortable.
Avec une remarquable économie de moyens, Barbara Noiret évoque sans peine l'antique combinaison de l'absence et du désir.
Florian Marco |